Candeille

Première Symphonie

Précision sur la première symphonie
(merci à Marie-Hélène Pardoen)

 


Contexte historique

L’année de création de la première symphonie de Pierre CANDEILLE ne connaît pas d’événements troublants particuliers, comme ce sera le cas quelques cinq ans plus tard. Certes une partie de la population connaît la misère, en raison d’un hiver pénible auquel a succédé une saison de crues assez virulente, mais des décisions rapides sont prises pour distribuer des secours. Qui plus est un certain nombre d’affranchissements sont votés, notamment en faveur des Juifs, du péage corporel et d’autres droits. Nous nous trouvons donc dans une période encore très calme du règne de louis XVI. La vie culturelle française est riche. Jacques Henri BERNARDIN de SAINT-PIERRE (1737-1814) fait paraître ses Etudes de la Nature et le Comte Antoine RIVAROL( 1753-1801) son Discours sur l’Universalité de la Langue Française. Le Marquis Pierre Simon LAPLACE 1749-1827) et Antoine Laurent LAVOISIER (1743-1794) présentent leur Mémoire dur la Chaleur. Et pendant que Claude Nicolas LEDOUX (17636-1806) termine son Théâtre à Besançon, Jean-François CHALGRIN (1739-1811) achève Saint-Philippe-du-Roule. Louis DAVID expose ses toiles Bélisaire, Le Serment des Horaces.


Des exploits en tout genre sont tentés : traversée de la Manche en ballon par Jean François PILATRE du ROZIER. C’est est un échec entraînant la mort de l’aérostier ; première ascension du Mont-Blanc par Jacques BALMAT et Michel Gabriel PACCARD.
Les parisiens ont pu applaudir, à la Comédie Française, la première représentation publique du Mariage de Figaro de Pierre Auguste CARRON de BEAUMARCHAIS (1732-1799). Et ils ont pleuré la mort du philosophe et encyclopédiste Denis DIDEROT, né quelques soixante et onze ans plus tôt, le 5 Octobre 1713.


La « saison musicale » parisienne est riche en moments forts. Mais en cette année 1784, la société la plus importante (après les nombreux concerts privés), le Concert Spirituel doit déménager. Louis XVI réintègre les Tuileries, et expulse de la salle le célèbre Concert. Celui-ci déménage et se réfugie quelques pièces plus loin, dans la « Salle des Machines », une salle que tous s’accordent à dire qu’elle est « horriblement enfumée »,mal éclairée, d’une « mesquinerie affreuse » et médiocrement favorable à la musique .


Dans les programmes présentés, nous pouvons encore noter la prédominance de la musique à caractère religieux, mais la symphonie fait sa percée, accompagnée par sa sœur presque jumelle, la symphonie concertante. Aux noms de GOSSEC, RIGEL et HAYDN,dont le nom figure à toutes les séances, viennent s’ajouter ceux de CAMBINI, DEVIENNE, DAVAUX, BLASIUS, PLEYEL, ROSETTI et bien sûr CANDEILLE.


Nous pouvons remarquer que cette fin de siècle est riche en événements de toute sorte et que ce sont des révolutions qui s’engagent, bien avant la Révolution Française.

Son Style


Sa première symphonie est donnée au Concert Spirituel le 10 Juin 1784. Les journaux de l’époque nous proposent des avis partagés sur cette première représentation. Ainsi Les Annonces écrivent : « le concert d’avant-hier ayant été, en général, très goûté et bien exécuté, nous croyons devoir dire un mot des morceaux neufs qu’on y a entendu. La symphonie de M. Candeille, qui est son premier ouvrage en ce genre, a paru remplie d’effet et d’harmonie ; ce qui doit l’engager à redoubler d’efforts pour mériter de nouveaux suffrages »


Le Mercure est du même avis. Il note : « La symphonie de M. Candeille, qui a commencé le Concert du Jeudi 10 Juin, a paru d’un bon effet ; on ne peut que l’inviter à cultiver ce genre de composition ».


Par contre, le Journal de Paris n’épouse pas cet avis : « L’exécution de la symphonie de M. Candeille, qui a fait l’ouverture du Concert d’avant-hier, a été fort applaudie. On a reproché cependant à l’auteur trop peu de chant dans le premier morceau, et de l’avoir fait d’un genre trop bruyant. L’andante et le Presto rappellent en tout le style de Toeschy… » .
Mais, il changera d’avis quelques temps plus tard : « Le dernier morceau fut très goûté dans la salle ; on ne s’attendait pas à y retrouver l’air Aisément celà se peut croire ; on a ri et on a fini par applaudir » .


Signe que les goûts évoluent assez rapidement, en ce qui concerne la musique tout du moins.


Nous avons ici l’exemple typique de la querelle qui émaille l’esthétique de la symphonie tout au long de cette fin du XVIIIème siècle. D’un côté des théoriciens prônent une musique plus proche de la voix, voire qui se calque sur elle, de l’autre des compositeurs qui n’en font qu’à leurs oreilles et qui décident, enfin, d’écrire de la musique typiquement instrumentale. Si les journaux ne sont pas unanimes dans leurs critiques, il y a fort à parier que les symphonies de CANDEILLE épousaient bien les caractéristiques de son époque et parvenaient à choyer les oreilles de tous les protagonistes.


Si l’on s’attarde un peu sur sa première symphonie – la seule dont on aie des critiques – nous pouvons remarquer :
- qu’elle est écrite pour 8 parties, à l’image de 54% des œuvres symphoniques de cette période.
- Les vents étant par deux : flûtes, hautbois, clarinettes, bassons, cors, trompettes, timbales et cordes.
- Elle comprend trois mouvements, comme 60% de ses contemporaines : allegro molto, andante pastorale con expressionne et presto.

Nous pouvons donc en conclure que P.J. CANDEILLE suivait la mode et les goûts de son publique. Il était bien dans son temps et savait, somme toute, choisir ses auditions, car à la création de sa symphonie, nul ne pouvait faire de comparaison avec HAYDN, ce dernier n’était pas au programme .